Pesticides : le Sénat supprime l’interdiction des rabais et promotions

« AU CŒUR DU DÉBAT » sur PUBLIC SÉNAT – 02/07/2018 – Par Simon Barbarit et François Vignal

Lors de l’examen du projet de loi agriculture et alimentation, les sénateurs ont supprimé l’interdiction des ristournes sur les pesticides. Un vote qui, pour le sénateur écologiste, Joël Labbé, est le résultat de l’influence des lobbies.

« Ça faisait partie des claires avancées de l’Assemblée nationale » a regretté le sénateur écologiste, Joël Labbé. En début d’après-midi, le Sénat a voté la suppression de l’article 14 de la loi agriculture et alimentation. L’article interdisait « remises, rabais, et ristournes » pour la vente de « produits phytopharmaceutiques », pesticides et autres désherbants.

Joël Labbé y voit la main des lobbies

L’article avait été supprimé en commission qui a estimé notamment qu’un tel dispositif « se traduirait par une augmentation considérable des charges des agriculteurs » comme l’a expliqué sa vice-présidente centriste, Anne-Catherine Loisier.

Malgré plusieurs amendements de réintroduction de l’article 14 dans la loi, présentés par le gouvernement, les communistes, les socialistes, ou encore du sénateur écolo Joël Labbé, le Sénat a voté sa suppression.

Sur ce sujet sensible, le ton est monté entre les élus, lorsque le sénateur Labbé a affirmé qu’il sentait dans cette suppression « l’influence des groupes de pression pour faire en sorte qu’on continue avec ce système ».

« C’est très blessant et ça ne donne pas l’image d’une assemblée comme la notre »

 

 

Une allusion qu’a peu goûtée, la présidente LR de la commission des affaires économiques, Sophie Primas. « Je voudrais qu’on évite les accusations. Pardon Joël (Labbé), mais ce que tu dis est très accusatoire (…) c’est très blessant et ça ne donne pas l’image d’une assemblée comme la notre, qui tu le sais, est une assemblée qui travaille sur le fond (…) Il y a des lobbies qui existent et ces lobbies nous n’en sommes pas sensibles » a-t-elle assuré avant « d’appeler au calme » dans l’hémicycle.

« Nos jardiniers du Jardin du Luxembourg utilisent des préparations à base d’ail et de purin de plantes »

Joël Labbé, toujours très actif sur ce texte, a ensuite défendu les produits de substitutions aux pesticides. Il a défendu le retour au texte de l’Assemblée, qui permet d’autoriser facilement les substances bio issues des « parties consommables de plantes ». Les sénateurs ont eux introduit une autorisation « selon une procédure et une évaluation simplifiées ». Un frein à leur utilisation, selon le sénateur du Morbihan, épaulé sur le sujet par le sénateur de Guadeloupe Dominique Théophile, membre du groupe LREM. « Ces alternatives aux produits phytopharmaceutiques restent insuffisamment développées du fait d’une lourdeur et d’une complexité administrative » souligne l’élu d’Outre-mer.

 

 

Le sénateur écologiste du groupe RDSE a trouvé le parfait exemple pour tenter de convaincre ses collègues (voir la vidéo ci-dessus) : « Si ces plantes peuvent être consommées pour l’alimentation humaine, elles n’ont pas de risque particulier. Ces solutions sont largement utilisées sur le terrain, jusque dans le Jardin du Luxembourg, propriété du Sénat… » Il brandit alors une feuille :

« Je vous ai apporté un document qui est une facture du Jardin du Luxembourg, qui montre que nos jardiniers utilisent des préparations à base d’ail et de purin de plantes, donc des PNPP (préparations naturelles peu préoccupantes, ndlr). Comment justifier de continuer à interdire ce qui est utilisé jusque sous nos fenêtres ? »

« Certaines parties de plantes sont toxiques »

« Il n’est absolument pas question d’interdire quoi que ce soit. La commission a maintenu la liste des 148 plantes déjà utilisées » a répondu la sénatrice UDI Côte-d’Or Anne-Catherine Loisier, corapportrice du texte. Mais « ce n’est parce que la plante est comestible que l’utilisation à forte dose ne pose pas de problème ». Ce qui justifie, à ses yeux, une évaluation de l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

Le ministre Stéphane Travert abonde en son sens : « Certaines parties de plantes sont toxiques. Il y a la perte des cheveux avec l’ingestion trop importante de courge par exemple. Sur la rhubarbe, vous avez une partie consommable, mais une partie qui ne l’est pas, avec une toxicité sur les feuilles. Il est même impossible de les mettre dans le composteur ».

Le ministre et la rapporteure ont cependant soutenu un amendement de la commission du développement durable permettant que les produits issus des parties consommables des plantes fassent « l’objet d’une procédure adaptée, en vue de faciliter leur utilisation, sans les soustraire à toute évaluation préalable ».

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