Débat sur l’avenir industriel de la filière aéronautique et spatiale face à la concurrence

« Les dirigeables ont de nombreuses qualités ! »

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais à mon tour remercier nos collègues du groupe CRC d’avoir provoqué la tenue de ce débat en séance, qui nous permet de nous exprimer sur ce sujet d’importance.

La France et l’Europe possèdent un tissu industriel aéronautique et spatial extrêmement développé, emmené par des groupes comme Airbus, Thales, Dassault aviation, ATR, Eurocopter, Arianespace, Astrium, Safran… Ces entreprises couvrent l’ensemble de la filière, depuis les avions gros porteurs jusqu’à la construction et l’envoi de satellites géostationnaires, sans oublier la défense.

Dans le domaine spatial, Arianespace a remporté 60 % des contrats de lancement de satellites géostationnaires en 2013. La concurrence américaine de SpaceX, qui a déjà été évoquée, et celle des Chinois, avec les fusées Longue Marche, nous poussent donc à envisager le futur en prenant la décision ferme, et cela depuis le mois de décembre dernier, de développer Ariane 6.

Le défi est de taille : il faut un lanceur qui puisse remplacer Ariane 5 en termes de fiabilité et de puissance, tout en gagnant en compétitivité et en modularité. C’est en réussissant ce défi technique que nous pourrons conserver notre place de leader mondial des lancements de satellites.

Si les Américains cherchent avec SpaceX à renouveler le genre des lanceurs réutilisables, il est aujourd’hui peu probable que, à brève échéance, la remise en service des moteurs ayant déjà subi un vol soit rentable et fiable. Quant à la récupération des étages inférieurs et des propulseurs d’appoint, elle apparaît utile, mais à condition de les recycler. Nous avons mis à profit les innovations développées avec le lanceur Vega, afin d’améliorer le coût des lanceurs et d’en alléger la structure.

Il est également crucial, à l’heure actuelle, de limiter le nombre de débris spatiaux causés par les activités humaines en orbite, au risque de se priver à brève échéance d’un accès à l’espace qui soit sûr et fiable.

Le plus grand problème est posé par les débris de taille moyenne – entre un et dix centimètres –estimés aujourd’hui à environ 200 000, qui ne sont pas catalogués alors qu’ils présentent un risque très important et, surtout, pour lesquels il n’existe pas de protection.

Parmi les innovations en gestation dans le secteur aéronautique, l’une d’elles a retenu mon attention : il s’agit du retour des aérostats, plus communément appelés dirigeables.

Un peu à la manière des tramways du début du XXe siècle que l’on a abandonnés au profit de la voiture pour finalement y revenir au XXIe siècle, le dirigeable, que l’on avait abandonné au profit de l’avion, beaucoup plus rapide, se prépare un retour serein dans le domaine du transport aérien. Quelques vieilles images persistent dans l’imaginaire collectif, notamment celle de l’incendie du zeppelinHindenburg. Pourtant, aujourd’hui, on gonfle les dirigeables à l’hélium, qui, lui, est totalement ininflammable.

Les dirigeables présentent de nombreuses qualités. Ce mode de transport économique bénéficie du meilleur rapport« masse transportée-coût kilométrique »après le transport fluvial : il permet de véhiculer par les airs de très lourdes charges ; les défaillances des moteurs sont moins critiques que pour un avion ; les dirigeables modernes peuvent atterrir pratiquement n’importe où et ont la capacité de rester dans le ciel très longtemps et silencieusement.

Seule ombre au tableau des dirigeables, l’hélium, qui est le deuxième élément le plus abondant de l’univers après l’hydrogène, est, ironiquement, assez rare sur la Terre. De plus, les gisements actuels sont en cours d’épuisement à moyen terme, ce qui impose la prudence.

Certaines entreprises sont en train de développer des modèles hybrides, dont la sustentation n’est que partiellement assurée par le ballon, le reste étant fourni par l’aérodynamisme, la forme de l’engin et sa vitesse comme pour un avion.

À titre d’exemple, le Stratobus du groupe Thales est un ballon dirigeable à propulsion électrique capable de rester en vol stationnaire dans la stratosphère, à plus de vingt kilomètres d’altitude. Le ballon, dont la mise sur le marché est prévue en 2022, doit remplir des missions simples : être un relais pour les télécommunications et servir de poste d’observation. Il pourra servir autant à l’observation militaire des mers au large de la Somalie, par exemple, qu’à envoyer de la 4G à des millions d’utilisateurs d’Internet.

À l’heure où l’on constate que le secteur du transport aérien produit une part non négligeable des émissions de CO2 mondiales, les acteurs du secteur ont consenti des efforts pour réduire leurs émissions. La contribution de l’aviation aux émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine est actuellement seulement de 2 % à 3 %. L’enjeu consiste à stabiliser, puis à diminuer ce taux.

Un transport aérien durable et responsable doit permettre de réduire les émissions de C02, d’améliorer les effets produits sur la qualité de l’air et de réduire le bruit perçu.

La France, à travers son soutien constant à l’innovation, sera, nous n’en doutons pas, un acteur clef de l’évolution de cette filière, pour répondre aux enjeux du XXIe siècle.

En conclusion, j’ai entendu les réserves de notre collègue Michelle Demessine sur une forme de libéralisation de ce secteur. Il est nécessaire de mettre en œuvre ces politiques, qui doivent être publiques étant donné les stratégies de sécurité et de souveraineté, tant nationales que, plus encore, européennes. L’avenir est là !(Applaudissementssur les travées du groupe écologiste, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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