Proposition de loi relative aux missions de l’établissement national des produits agricoles et de la pêche maritime

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise, en deux articles, à clarifier certaines missions de l’établissement FranceAgriMer.
L’article 1er, qui concerne l’aide, notamment alimentaire, aux plus démunis, est essentiel à nos yeux.

Sans reprendre toute l’histoire de l’aide européenne aux plus démunis, que Mme la rapporteur a très bien présentée, je rappellerai que, le 20 mai dernier, la commission de l’emploi et des affaires sociales du Parlement européen a adopté un nouveau règlement pour le Fonds européen d’aide aux plus démunis : à compter du 1er janvier 2014, ce fonds servira notamment à financer les banques alimentaires, en remplacement de l’ancien programme européen d’aide aux plus démunis.

Depuis que, il y a plus de trois ans, les aides alimentaires européennes ont été remises en cause, cet enjeu est crucial. En effet, 18 millions d’Européens bénéficient aujourd’hui de ces aides. Vous avez eu raison, monsieur le ministre, de parler d’un enjeu de société. Il s’agit même, selon nous, d’un choix de société : allons-nous pouvoir continuer ainsi ? Notre réponse est non ! C’est pourquoi nous estimons qu’une transition et des changements fondamentaux sont nécessaires.

La création de ce fonds est évidemment une bonne nouvelle : il permettra de distribuer nourriture et aide matérielle aux personnes les plus démunies. Je pense en particulier aux sans-abri, car, parmi ceux qui ne mangent pas à leur faim, il y en a qui n’ont pas non plus de toit.

Jusqu’à présent, vingt pays recevaient les financements européens pour l’aide alimentaire ; désormais, les vingt-huit pays de l’Union européenne en bénéficieront. Par cette décision, les députés européens ont rappelé que la solidarité européenne n’est pas à la carte et que tous les gouvernements sont responsables de la lutte contre la pauvreté.

En ce qui concerne la redistribution de ces aides sur notre territoire, je suis d’accord avec Bernadette Bourzai : compte tenu de sa compétence et de son expérience reconnues en matière d’aide alimentaire, il importe que FranceAgriMer soit désigné comme organisme intermédiaire pour la gestion du FEAD ; tel est l’est l’objet de l’article 1er de la proposition de loi.

Si cette mesure est utile et urgente, d’autres le sont également pour améliorer le fonctionnement de cet établissement et lui permettre de jouer pleinement son rôle ; monsieur le ministre, nous attendons de la future loi-cadre dite d’avenir agricole qu’elle comporte les mesures appropriées.

Quant à l’article 2 de la proposition de loi, nous le trouvons davantage contestable, quoiqu’il soit nécessaire. Il autorise FranceAgriMer à passer des marchés publics selon la procédure simplifiée prévue à l’article 69 du code des marchés publics, afin de pouvoir organiser, dans les délais impartis, la participation de la France à l’exposition universelle de Milan en 2015. Face à la nécessité d’agir dans l’urgence, les législateurs que nous sommes sont, d’une certaine façon, mis devant le fait accompli.

De fait, les tergiversations de l’ancien président de la République au sujet de la participation de la France à cet événement nous contraignent aujourd’hui à voter en faveur d’une procédure dérogatoire au fonctionnement normal de FranceAgriMer, afin que cet établissement puisse organiser la participation de la France. Le gouvernement actuel n’est pour rien dans ces engagements tardifs et dans ces délais devenus très courts, le projet de la France devant être transmis aux autorités italiennes et aux organisateurs de l’exposition avant le 31 décembre 2014.

Par ailleurs, nous tenons à insister sur un autre aspect de notre participation à cette exposition universelle : je veux parler du message que la France compte y porter. « Nourrir la planète, énergie pour la vie », tel est le thème de la future exposition. Beau programme !

Que la France mette en valeur la qualité de ses productions agricoles, nous en sommes d’accord. En revanche, nous condamnons une autre lecture, encore beaucoup trop répandue, de l’expression «nourrir la planète». Les pays occidentaux ont-ils vocation à nourrir la planète à eux seuls ? Cela ne sera pas possible !

Dans les pays du sud, en particulier en Afrique de l’Ouest, notre système de fonctionnement appauvrit davantage encore les campagnes, provoquant non seulement un exode rural, l’afflux de personnes vers les bidonvilles et la multiplication des tentatives d’immigration, mais aussi le départ vers le Sahel de jeunes qui répondent à l’appel de certaines sirènes malsaines.

À notre sens, en plus de mettre en valeur ses produits, la France devrait défendre ce message à Milan et se montrer exemplaire dans son soutien aux efforts menés en faveur de la souveraineté alimentaire.
En commission, j’ai fait état du souhait des sénateurs écologistes que M. Alain Berger, commissaire général pour l’exposition universelle de 2015, lorsqu’il le voudra bien, vienne échanger avec nous sur les messages à défendre ; une réponse positive a été donnée, et nous souhaitons vivement que cette rencontre puisse avoir lieu.

En tout cas, nous voterons cette proposition de loi, et nous espérons que, à la suite du Sénat, l’Assemblée nationale l’adoptera à l’unanimité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

> voir objet du texte et étapes de la discussion

Loi promulguée le 27 décembre 2013

Les commentaires sont fermés.

ouvrir