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Loi Climat : les sénateurs entérinent la suppression du délit d’écocide

PUBLIC SÉNAT – 25/06/2021

L’examen du projet de loi Climat se poursuit au Sénat, avec l’adoption ce vendredi 25 juin, de deux articles régissant les sanctions en cas d’atteinte grave à l’environnement. Anciennement porteurs de la création du délit d’écocide, cette notion a été supprimée par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. Cette suppression a été confirmée en séance par la majorité sénatoriale, au grand dam des sénateurs socialistes et écologistes.

Les sénateurs ont adopté cet après-midi en séance les articles 67 et 68 du projet de loi Climat, dans les mêmes termes que ceux de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Elle avait supprimé le délit d’écocide, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, pourtant souhaité par la Convention citoyenne pour le climat et promis par le garde des Sceaux et la ministre de la Transition écologique.

La nouvelle rédaction des deux articles crée ainsi une circonstance aggravante en cas de mise en danger grave et durable (sur au moins sept ans) de l’environnement (faune, flore et qualité des sols). Elle renforce les sanctions pénales qui s’appliquent dans ce cas, les faisant aller jusqu’à dix ans d’emprisonnement et 4,5 millions d’euros d’amende. Enfin, elle crée, dans le code de l’environnement, un titre relatif aux « atteintes générales aux milieux physiques ».

La majorité sénatoriale défavorable au délit d’écocide

Défavorable au terme d’ « écocide », la majorité de droite du Sénat a supprimé en commission cette notion en réécrivant les deux articles concernés. Pour la sénatrice LR Marta de Cidrac, rapporteure du texte, cette nouvelle rédaction fait « œuvre de simplification, de clarification et de sécurisation juridique ». Pour elle, la notion d’écocide fait référence à une « infraction criminelle qui pourrait être reconnue à l’échelle internationale ». « Ce serait source de confusion d’introduire en droit interne un délit d’une portée différente », explique-t-elle.

Le délit d’écocide n’est pas décrié que par la majorité sénatoriale. Il avait en effet déjà été sévèrement jugé par le Conseil d’Etat en février dernier. Ce dernier considérait qu’il portait sur des faits déjà sanctionnés et risquait ainsi d’être inconstitutionnel, car il permettrait de condamner plusieurs fois une personne pour les mêmes faits.

Les socialistes et les écologistes au front

La déception est importante sur les bancs socialistes et écologistes. Ils n’étaient ni satisfaits par la version « édulcorée » du gouvernement, ni par celle de la commission. Ce que les sénateurs socialistes et écologistes voulaient, c’était la création d’un crime d’écocide, beaucoup plus offensif et symbolique, dans les mêmes termes que la Convention citoyenne pour le climat.

Ils n’ont pas mâché leurs mots : « Je suis triste que nous n’arrivions pas à inscrire dans la loi ce crime d’écocide », regrette Angèle Préville, sénatrice socialiste du Lot. « Le Président de la République n’a pas respecté ses engagements pris à l’endroit de la Convention citoyenne. […] [Ce] délit d’écocide n’est en réalité qu’un délit de pollution », fustige la sénatrice écologiste de paris Esther Benbassa.

Tout au long de la séance, les sénateurs socialistes et écologistes ont tenté par tous les moyens de faire adopter le crime d’écocide, en vain. Suite aux rejets de leurs amendements, ils se sont repliés sur la suppression de la notion de « durabilité », nécessaire pour définir les atteintes graves à l’environnement. Pour être sanctionnée dans le texte, une action portant atteinte à l’environnement doit être durablement nocive pour l’environnement, c’est-à-dire s’étendre sur une certaine durée. Fixée à 10 ans par l’Assemblée nationale, la commission de l’aménagement du territoire du Sénat l’a abaissée à 7 ans.

Les sénateurs socialistes et écologistes ont ainsi tenté de supprimer cette condition, invoquant la catastrophe du naufrage du pétrolier Erika en décembre 1999 et le plus récent accident de l’usine de Lubrizol, dont les effets sont très difficiles à évaluer. Pour appuyer son argumentation, le sénateur écologiste du Morbihan Joël Labbé explique « Cet article ne permettrait pas de sanctionner les comportements qui ont mené à la catastrophe de l’Erika », puisque la durée des dommages qui avait été évaluée se situait en dessous des 7 ans.

 

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