Projet de loi relatif à la consommation

Conclusions de la Commission Mixte Paritaire

« Voilà des années que des consommateurs, ou plutôt des citoyens demandaient droit de savoir, protection et pouvoir d’agir. »

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les corapporteurs, mes chers collègues, nous assistons enfin à l’aboutissement de ce projet de loi relatif à la consommation.

Voilà des années que des consommateurs, ou plutôt des citoyens demandaient droit de savoir, protection et pouvoir d’agir.

Les scandales sanitaires, les défaillances – voulues ou non – d’un bout à l’autre des chaînes de production aboutissent à des drames humains et environnementaux majeurs, nous l’avons vu encore tout récemment.

Souvenez-vous de l’épisode des lasagnes à la viande de cheval. Le journal Le Monde avait alors publié une lithographie retraçant le parcours des plats cuisinés en question : pas moins de deux traders, quatre entreprises et cinq pays étaient concernés ! C’est là un parcours symbolique du non-sens dans lequel nous nous trouvons. Et ce non-sens prêterait à rire s’il n’avait pour conséquence indirecte le creusement des inégalités sociales, et pour seul horizon la précarisation.

Peut-être certains verront-ils là un raccourci ; toutefois, je reste persuadé que la justice sociale est intimement liée aux choix économiques et que ces derniers sont eux-mêmes indissociables des enjeux environnementaux.

Aussi, je salue les dispositions du présent texte qui visent à prévenir le surendettement. Il s’agit de protéger nos concitoyens de leurs propres appétits consuméristes, face à l’incroyable pouvoir d’innovation de certains acteurs financiers, en particulier des professionnels du crédit à la consommation.

Quant au RNCP, on a beau l’appeler « fichier positif », sa mise en place constitue, qu’on le veuille ou non, une forme de fichage. Cela étant, M. le ministre est parvenu à nous convaincre du bien-fondé de ce dispositif, en insistant sur le périmètre qui lui sera assigné.

La durée de la garantie légale de conformité est portée à vingt-quatre mois. À nos yeux, cette mesure va dans le bon sens, et nous sommes très heureux qu’elle ait pu être maintenue par la commission mixte paritaire.

En revanche, je ne vous cache pas ma grande déception devant l’absence, dans le texte final, des dispositions visant à rendre gratuit l’usage du mandat-compte pour le paiement des factures d’eau et de téléphonie, même si je me réjouis que cette gratuité, adoptée en commission sur ma proposition, ait été maintenue pour la fourniture d’énergie. Je m’interroge encore sur les motifs qui ont conduit à refuser l’utilisation gratuite d’un des seuls modes de paiement auxquels certains de nos concitoyens ont accès.

J’en viens à la question de l’alimentation. Nos débats sur ce sujet, qui ont été particulièrement longs – j’en suis en grande partie responsable – ont conduit à l’adoption de dispositions intéressantes : l’étiquetage de l’origine des viandes, la mention du« fait maison » dans la restauration – le dispositif reste cependant insuffisant à nos yeux pour permettre au citoyen consommateur de savoir ce qu’il y a dans son assiette –, la sécurisation juridique des magasins de producteurs…

Je ne m’attendais pas à être autant interpellé sur ce thème, notamment par les médias, eu égard à la modestie du volet du texte qui lui est consacré. Cela montre qu’il existe une réelle attente de davantage de transparence et de la mise en place d’une démarche vertueuse en matière de production, de transformation et de distribution, synonyme autant de qualité gustative et nutritionnelle que de reterritorialisation de l’économie alimentaire.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est par l’assiette que nous pourrons renouer avec la noblesse d’une agriculture de proximité, qui doit retrouver sa fonction nourricière !

Vous l’aurez compris, je ne suis pas disposé à laisser ce sujet de côté à l’avenir. Nous serons attentifs, en particulier, aux décrets d’application relatifs à la mise en place de la mention « fait maison », ainsi qu’aux positions qui seront défendues à l’échelon de l’Union européenne concernant l’étiquetage des viandes.

Je conclurai mon propos en évoquant deux autres sujets nous tenant à cœur, à nous écologistes : l’action de groupe et la lutte contre l’obsolescence programmée.

L’adoption des dispositions de ce texte concernant l’action de groupe constitue une simple première étape. Vous avez à plusieurs reprises indiqué, monsieur le ministre, que le Gouvernement souhaitait encourager la systématisation de l’action de groupe, malgré les difficultés de sa mise en place, en l’étendant à la santé et aux préjudices écologiques. Les sénateurs écologistes, qui avec d’autres sont très impliqués sur ce dossier, attendent de vos collègues chargés de la santé et de l’environnement qu’ils engagent les étapes suivantes.

Le problème de l’obsolescence programmée est reconnu, mais il n’a pas été possible d’obtenir l’inscription dans la loi de la définition de cette pratique, afin de mieux se donner les moyens d’y faire face. Cela s’est joué à une seule voix près, mais ce vote nous a profondément déçus. C’est une occasion manquée. On ne peut faire le pari de l’économie circulaire sans lutter, parallèlement, contre les pratiques visant à pousser à la consommation.

Pour que la société de consommation puisse fonctionner, il faut établir un juste équilibre entre consommation et production. Cet équilibre a été rompu, ces dernières années, en raison de la logique de court terme adoptée par certains. La surproduction a engendré une surconsommation – du moins pour ceux disposant de suffisamment de moyens – et une surexploitation de toutes les ressources, jusqu’au plus profond de la terre, mettant en péril les équilibres planétaires.

Cette loi est une étape nécessaire, mais elle n’est qu’une étape. Nous devons promouvoir sans plus attendre une consommation éthique et partagée, reposant sur une production s’inspirant des mêmes valeurs, afin d’avancer vers la sobriété heureuse chère à Pierre Rabhi.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Joël Labbé. En dépit des motifs d’insatisfaction que j’ai évoqués, nous voterons ce texte. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.)

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