Projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur l’historique de ce projet de loi, qui a été rappelé par mes collègues. Nous avons affaire à un texte plutôt technique qui vient poursuivre l’œuvre de rationalisation de l’organisation des chambres consulaires, entamée il y a maintenant plus de dix ans.

Cette régionalisation de l’organisation va dans le sens des textes de décentralisation, même s’il faut veiller à ne pas supprimer l’ancrage territorial de proximité. La création des grandes régions vient encore accélérer ce phénomène. En ce sens, je suis toujours particulièrement sensible aux arguments de notre collègue Alain Bertrand, ardent défenseur de nos territoires ruraux, qui restent incontestablement une précieuse richesse, non seulement d’un point de vue patrimonial, mais aussi parce qu’ils sont porteurs d’avenir pour une économie qui devra, à terme, devenir résiliente.

Dans le Morbihan, les chambres sont surtout remontées contre les prélèvements sur réserve dont elles ont fait l’objet ces dernières années et qui leur ont semblé plutôt injustes. Elles ont dû annuler un certain nombre de projets économiques sur leur territoire, tels que des pépinières d’entreprises. Pour la chambre de commerce et d’industrie du Morbihan, il s’agit tout de même de 6 millions d’euros qui, au lieu d’être réinjectés dans l’économie locale, sont venus éponger – mais si peu ! – le déficit de l’État. Une meilleure concertation en amont aurait permis d’éviter le sentiment d’un arbitraire de l’État.

Je voudrais souligner le rôle clé des CCI et des CMA dans l’appui qu’elles fournissent aux entreprises de nos territoires, aussi bien dans la coordination du développement local que dans leur représentation au sein des instances nationales et internationales, trop souvent dominées par les grosses entreprises, multinationales notamment. Dans le Morbihan, la chambre de métiers et de l’artisanat regroupe 4 200 entreprises, soit 27 500 salariés.

Je me suis intéressé plus particulièrement à l’apprentissage, qui permet d’obtenir tous les niveaux de diplômes, du CAP jusqu’au bac+5, grâce à des formations qualifiantes, responsabilisantes et diplômantes. Il permet une meilleure intégration sur le marché du travail des jeunes et associe les entreprises aux contenus des formations délivrées.

Mme Sophie Primas. Très bien !

Joël Labbé. Ces formations permettent de redonner une image valorisante auprès des jeunes de nombreux métiers manuels, par exemple les métiers de bouche. Notre institution peut s’enorgueillir d’accueillir les lauréats du concours des meilleurs apprentis de France : c’est toujours un moment fort pour nous, lorsque nous accueillons ces jeunes pour les honorer.

Je me réjouis également que le Président de la République ait fait de l’apprentissage une priorité pour l’année 2016.

Mme Sophie Primas. Il était temps !

Joël Labbé. Cependant, lorsque l’on définit des politiques prioritaires, il convient de s’assurer des moyens de financement de ces politiques.

Là encore, dans le Morbihan, les plafonnements et prélèvements des dernières années sur le budget de la chambre de métiers ont rendu la situation assez complexe. Cette chambre gère un CFA qui accueille 1 500 apprentis chaque année. La gestion d’un tel établissement nécessite des investissements mobiliers et immobiliers importants que le conseil départemental ne prend que partiellement en charge. À titre d’exemple, la chambre de métiers a investi, entre 2012 et 2016, près de 9,2 millions d’euros dans la rénovation de son CFA, dont 2,6 millions d’euros en autofinancement. D’où la nécessité de conserver des réserves, même optimisées…

Par ailleurs, le financement des CFA passe aussi par la taxe d’apprentissage. Celle-ci représente près de 20 % du budget de la chambre de métiers et de l’artisanat. Il convient donc de veiller à ce que la taxe d’apprentissage soit réellement fléchée vers l’apprentissage.

À compter du 1er janvier 2016, un nouvel organisme collecteur interconsulaire régional recouvrera la taxe d’apprentissage pour le compte des chambres d’agriculture, des chambres de métiers et des chambres de commerce et d’industrie. Si sa création n’a pas présenté de difficultés majeures, il conviendra de rester particulièrement vigilant quant à la répartition des fonds libres, la loi ne prévoyant pas, au niveau national, de critères d’affectation objectifs et réalistes, comme le nombre d’apprentis formés par chacun des réseaux consulaires.

Les chambres de métiers ont besoin de ressources pérennes pour préparer l’avenir, former des jeunes, accompagner et soutenir les entreprises. Depuis 2013, le plafonnement de leurs ressources, toujours un peu plus à la baisse chaque année, fragilise les trésoreries des établissements, malgré les efforts de rationalisation et d’efficience de fonctionnement conduits depuis longtemps. En effet, les chambres de métiers et de l’artisanat de Bretagne se sont déjà engagées dans des démarches collectives d’optimisation de leurs moyens, car elles souhaitent conserver les capacités nécessaires au maintien de la proximité, de la qualité et de l’efficience des services offerts aux entreprises artisanales.

Enfin, je voudrais évoquer la question des moyens humains de l’apprentissage. Si deux tiers des enseignants-formateurs des CFA sont titulaires de leur poste dans le Morbihan, un tiers de ces enseignants restent en CDD sous convention financière avec les régions et, pour la plupart, ne travaillent pas à temps plein : ils oscillent entre mi-temps et temps partiel à 80 %, en fonction des demandes. Il conviendrait donc de trouver des solutions pour remédier à cette situation qui ne peut être acceptable.

Ce texte va dans le sens de la régionalisation et de la mutualisation. Il convient cependant de veiller au maintien de l’ancrage territorial. En fonction de l’évolution des débats, nous pourrions être favorables à son adoption. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

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