Ouest-France

Bretagne. Une étude menée pour mesurer le taux de cadmium des engrais, des hommes et des patates

OUEST-FRANCE – 13/09/2020 – Par Géraldine BRÉMAND

Des engrais, des pommes de terre et des échantillons d’urine confiés par 57 Bretons volontaires ont été analysés pour connaître leur teneur en cadmium. Les associations Halte aux marées vertes et Sauvegarde du Trégor participent à cette enquête, lancée par le journaliste Martin Boudot, pour l’émission d’investigation Vert de rage, diffusée sur France 5. Samedi 12 septembre 2020, à Pommeret (Côtes-d’Armor), les résultats ont été expliqués aux participants.

Au mois de janvier 2020, des habitants de Tréduder, dans les Côtes-d’Armor, avaient déposé des échantillons de leur urine à la mairie. L’objectif : mesurer le taux de cadmium, métal lourd classé cancérogène, que l’on trouve partout dans notre environnement.

Présent à l’état naturel, notamment dans le phosphate de calcium utilisé pour fabriquer des engrais minéraux, il s’accumule dans les sols, est absorbé par les racines des plantes et se retrouve dans l’assiette. L’alimentation est la principale source de cadmium pour les humains indique l’Anses, l’agence nationale de sécurité sanitaire.

À Pommeret (Côtes-d’Armor) et aussi à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) d’autres volontaires ont apporté leur flacon d’urine pour participer à l’enquête lancée par le journaliste Martin Boudot, sous les caméras de l’émission d’investigation Vert de rage, diffusée sur France 5. Au total, 57 échantillons fournis par ces Bretons, âgés de 47 à 75 ans, ont été analysés par le Dr. Joël Poupon, au laboratoire de toxicologie biologique de l’hôpital Lariboisière, à Paris, et Marie-Duigou, étudiante à l’Université de Bretagne occidentale.

L’analyse des engrais, des patates et des urines

Les scientifiques ont aussi passé au crible des engrais phosphatés utilisés en agriculture conventionnelle et épluché des échantillons de pommes de terre cultivées en Bretagne et d’autres régions. Les résultats de cette enquête, relayée par les associations de défense de l’environnement Halte aux marées vertes et Sauvegarde du Trégor, ont été présentés samedi 12 septembre 2020, lors d’une réunion publique à Pommeret.

Sur neuf engrais analysés, trois ont une teneur en cadmium supérieure à la limite votée au niveau européen (60 mg/kg, maximum applicable en 2022). Cinq ont une teneur supérieure aux 20 mg/kg recommandés par l’Anses, notamment pour diminuer l’exposition des enfants à ce métal lourd.

Dans les patates de l’agriculture conventionnelle bretonne, les teneurs des échantillons étudiés dépassent de 39 % en moyenne celles des autres régions. Quant aux volontaires bretons, ils sont douze à afficher un taux de cadmium dans les urines situé entre le seuil européen et celui, plus bas, préconisé par l’Anses.

L’accumulation des métaux lourds

« Le problème, c’est l’accumulation de métaux lourds au cours de la vie, qui conduit à nos maladies modernes », résume André Ollivro, de Halte aux marées vertes, pour qui lancer l’alerte sur le cadmium rejoint le combat contre les nitrates responsables de la prolifération des algues vertes, pour une agriculture plus respectueuse de l’homme et de la planète.

Une bataille que les écologistes comptent bien mener sur le terrain politique pour que la législation évolue : sur l’étiquetage « car beaucoup d’agriculteurs ignorent que les engrais contiennent du cadmium », souligne Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan, présent à Pommeret samedi, et « pour que les teneurs maximales autorisées soient abaissées aux niveaux recommandés par l’Anses ».

Aujourd’hui, il est difficile de se nourrir sans ingérer ce cadmium, présent partout. Pourtant, l’enlever du phosphate de calcium utilisé dans la fabrication des engrais est possible. « Rarement dans une pollution, commente le journaliste Martin Boudot, on a trouvé un coupable aussi facile à supprimer. »

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