Projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports

« C’est surtout l’écotaxe poids lourds, mesure phare de ce projet de loi, qui retient toute notre attention. »

Monsieur le président, Monsieur le ministre,
Monsieur le rapporteur, mes chers collègues,

Les écologistes ont soutenu ce projet de loi au Sénat et à l’Assemblée nationale, parce qu’il contient non seulement des dispositions tout à fait pertinentes – certes techniques pour certaines, mais de grande importance –, mais surtout des avancées sociales et environnementales que nous tenons à saluer. Aujourd’hui, nous voterons de nouveau en faveur de ce texte, pour toutes les raisons déjà expliquées lors de la première lecture par Ronan Dantec ; notre collègue, dans l’impossibilité d’être présent aujourd’hui, vous prie de bien vouloir excuser son absence.
L’avancée sociale de ce texte à saluer – et vous l’avez souligné, monsieur le ministre – concerne le cabotage maritime qui permet de rétablir les conditions d’une concurrence loyale entre les opérateurs du secteur en élargissant à tout le personnel navigant, et non pas seulement à l’équipage, les conditions sociales et les conditions de sécurité imposées au pavillon français, et ce sur tous les navires utilisés pour fournir une prestation de service dans les eaux françaises.
Sur le plan environnemental, comment ne pas dire un mot fort sur la mise en cohérence de notre législation avec le droit international concernant la réparation des dommages causés par les marées noires qui ont trop souvent touché notre littoral ?
Le Parlement a amélioré ce texte en adoptant plusieurs mesures tout à fait pertinentes, et nous nous en réjouissons ; il en est ainsi, par exemple, de la demande de rapport sur les conséquences de l’autorisation des 44 tonnes, à propos de laquelle notre groupe a déjà exprimé à plusieurs reprises sa très grande réserve.
Saluons le travail de nos collègues écologistes à l’Assemblée nationale, qui ont vu plusieurs de leurs propositions retenues, telles la création d’un schéma national directeur de la logistique afin d’optimiser les flux de marchandises, d’accentuer la part du transport ferroviaire, fluvial et maritime, de réduire les impacts et de rendre le système économique plus fort et plus efficace, ou la création d’aires de stationnement sécurisé pour les vélos dans les nouvelles gares et les gares réaménagées. Nous nous félicitons de ces avancées.
C’est surtout l’écotaxe poids lourds, mesure phare de ce projet de loi, qui retient toute notre attention.
Le Gouvernement avait annoncé sa volonté de « tenir bon » pour ne pas introduire de nouvelles dérogations ou exonérations sur la taxe poids lourds, et nous l’avons soutenu dans sa démarche. Nous considérons en effet que cette taxe doit être aussi efficace que possible, et nous regrettons que des exonérations aient été votées à la suite de diverses pressions. Nous en avons l’habitude, mais il ne faudrait pas que la portée de ce texte soit affaiblie par des exonérations et autres dégrèvements, comme cela arrive malheureusement trop souvent dans notre pays.
Nous regrettons ainsi, pour deux raisons, la réintroduction par la commission mixte paritaire d’une exonération sur les véhicules publics d’entretien et d’exploitation des routes, adoptée par voie d’amendement au Sénat puis supprimée par l’Assemblée nationale : d’une part, ce n’est pas parce qu’un véhicule est public qu’il ne pollue pas, et il devrait donc se voir appliquer l’écotaxe ; d’autre part, nous considérons que les pouvoirs publics, État et collectivités, ont pour mission d’impulser, de « montrer la voie » de la transition écologique. Leurs pratiques doivent servir d’exemples au secteur privé.
Un problème s’est posé pour trois régions, Midi-Pyrénées, Aquitaine et Bretagne : alors que leur spécificité était déjà prise en compte dans le projet de loi initial, elles ont obtenu une minoration supplémentaire. La prise en compte de la situation périphérique de ces régions ne devra pas être un frein à la transition.
Si le texte présente de réelles avancées, il nous faudra aller plus loin encore, car notre pays est gravement en retard par rapport aux autres pays européens en matière de fiscalité écologique : il se situe à la vingt-sixième place sur les vingt-sept États membres, ce qui représente, je le rappelle, 20 milliards d’euros de recettes fiscales à prélever pour rattraper la moyenne européenne. Six États européens ont mis en place une écotaxe sur les poids lourds : la Suisse, l’Autriche, l’Allemagne, la Pologne, la République Tchèque et la Slovaquie.
Compte tenu du retard de notre pays en matière de fiscalité écologique, la mise en place de l’écotaxe est donc plus que bienvenue.
La mise en œuvre de l’écotaxe n’est d’ailleurs qu’une première étape ; de nombreuses autres réformes doivent, selon nous, intervenir désormais dans l’instauration d’un système de fiscalité écologique, essentiel pour amorcer la transition écologique dont notre pays a besoin.
Je soulignerai ici quelques pistes, s’agissant du travail qui nous attend.
Sur l’écotaxe elle-même, nous appelons à une montée en puissance progressive du dispositif. Des dérogations régionales existent, comme je l’ai indiqué, ainsi qu’un abattement de 10 % en cas de souscription au système d’abonnement.
Nous pensons ainsi que la taxe devrait progressivement s’appliquer sur les routes qui sont pour l’instant en dehors du dispositif.
Les taux de la taxe seront réévalués annuellement par arrêté ministériel. Nous serons vigilants afin que ces arrêtés traduisent un renforcement régulier de l’écotaxe, pour y intégrer les externalités liées à la route notamment. À ce propos, un projet de loi sera soumis au vote du Parlement dans les prochaines semaines, qui transposera dans notre droit les modifications apportées à la directive Eurovignette en 2011. Cette directive prévoit la possibilité pour les États membres d’intégrer dans le montant des péages dus par les poids lourds les externalités négatives telles que le bruit ou la qualité de l’air. Or le projet de loi que nous allons examiner ne prévoit pas, pour l’instant, la prise en compte de ces externalités. Nous y voyons une occasion manquée de faire appliquer le principe « pollueur-payeur ».
Nous considérons enfin qu’un moyen doit être trouvé pour affecter réellement le produit de la taxe au report modal. Actuellement, en effet, le système prévoit que le produit de l’écotaxe sera versé au budget général de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, qui finance aussi bien les routes que les alternatives à la route. Cela nous semble contraire à l’engagement du Grenelle selon lequel l’écotaxe poids lourds devait financer les politiques de report modal.
Pour conclure, je rappelle une nouvelle fois que nous, écologistes, sommes convaincus de l’absolue nécessité d’une fiscalité écologique juste et pragmatique. Par conséquent, le groupe écologiste se prononcera en faveur de ce texte, considérant qu’il s’agit d’une étape sur la route, sur la voie, et, dirai-je même, sur les voies qui mènent à la transition. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

> voir objet du texte et étapes de la discussion

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