Projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire

Adoption définitive des conclusions de la commission mixte paritaire

Joël Labbé. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la grandeur de la démocratie réside dans le débat contradictoire. Sans surprise, nous allons une fois de plus réaffirmer notre opposition à ce texte. À l’issue des débats, nous restons plus que jamais convaincus que la solution aux difficultés économiques rencontrées par la filière de la betterave sucrière ne peut, en aucun cas, consister à réautoriser l’usage préventif de poisons, sur plus de 400 000 hectares.

Alors que la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a été votée voilà déjà quatre ans, ni l’État ni les filières n’ont pris leurs responsabilités pour amorcer la transition nécessaire à son application.

Même dans une situation d’urgence, des alternatives restaient possibles. En effet, le Gouvernement aurait pu davantage étudier la piste des mécanismes de compensation ou de mutualisation, auxquels par exemple l’Italie a eu recours.

De même, la France aurait pu combattre avec force, à l’échelle européenne, le principe de dérogations pour autoriser l’utilisation de certains produits phytopharmaceutiques, puisque, je le rappelle, la Commission européenne a estimé que ces dérogations restaient problématiques.

Par ailleurs, nous regrettons que le débat ait été tronqué à la suite d’une erreur de vote, ce qui nous a empêchés de présenter nos amendements. Nous considérons notamment qu’il aurait été nécessaire de préserver a minima les zones Natura 2000 ainsi que les parcs et réserves naturels de l’usage de ces dérogations. Nous aurions souhaité que la Haute Assemblée puisse se prononcer sur la protection minimale et essentielle de ces zones par un vote.

Encore une fois, nous restons convaincus que, face à des difficultés économiques réelles, il était possible de faire autrement. Ce texte ne fait qu’étendre la trop longue liste des renoncements aux ambitions fortes que nous devrions nourrir pour être à la hauteur de l’urgence écologique qui menace.

En effet, nos débats interviennent deux ans après la promulgation de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite Égalim, dont le bilan est tellement amer qu’hier, mardi 3 novembre, pour l’anniversaire de cette loi, trente syndicats et associations rendaient publique une analyse consacrant l’échec du texte à atteindre ses objectifs. Qu’il s’agisse du revenu des agriculteurs, de la relocalisation de l’alimentation, de la sortie des pesticides, nos réponses ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Nos débats interviennent également alors qu’au fil des négociations la réforme de la politique agricole commune (PAC) s’annonce décevante : son chapitre environnemental reste d’autant plus flou que rien ne garantit, à ce stade, que la réforme soit compatible avec le pacte vert européen.

Enfin, l’examen du projet de loi de finances pour 2021 laisse envisager, encore une fois, un manque criant de moyens pour le développement de l’agriculture biologique et de l’agroécologie, en particulier dans le domaine de la recherche.

Face à l’urgence du changement climatique et de l’effondrement de la biodiversité, le temps presse. Des solutions existent, qui devraient être étudiées.

Ainsi, dans son rapport de 2018, l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) a montré qu’une Europe entièrement agroécologique, qui serait affranchie des intrants de synthèse et qui reposerait sur la polyculture, l’élevage et le déploiement de prairies naturelles, pourrait nourrir durablement 530 millions d’Européens en 2050.

Par conséquent, le débat sur les néonicotinoïdes est étroitement lié au choix de notre modèle agricole. Certains défendent le modèle actuel d’industrialisation de l’agriculture, ce qui reste parfaitement légitime. D’autres, de plus en plus nombreux, n’y croient plus et prônent, contre les excès du modèle actuel, un modèle agroécologique basé sur l’agriculture paysanne, pourvoyeuse d’emplois et capable de redynamiser les territoires ruraux.

En guise de conclusion, je précise que la fin de mon intervention précédente, la semaine dernière, dans cet hémicycle, était inspirée de Georges Brassens. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)

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