Lutte contre la progression du frelon asiatique

14e législature / Question écrite n° 13526
> publiée dans le JO Sénat du 30/10/2014

M. Joël Labbé attire l’attention de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les carences de la lutte contre la progression du frelon asiatique. Malgré les annonces encourageantes des ministres de l’agriculture et de l’écologie en octobre 2012, la lutte mise en place n’est pas à la hauteur des attentes des apiculteurs. Au lieu d’être classé en danger sanitaire de 1ère catégorie comme initialement annoncé, le frelon asiatique a été classé en danger sanitaire de 2ème catégorie, privant la lutte contre l’insecte de tout caractère obligatoire et des moyens financiers nécessaires. Bien que le piégeage de printemps des reines fécondées ait montré une réelle efficacité pour diminuer la pression du frelon sur les ruches, la méthode est écartée des moyens de lutte reconnus dans la note de service du 10 mai 2013 définissant « les mesures de surveillance, de prévention et de luttes permettant de limiter l’impact du frelon asiatique ». Enfin, à défaut d’autorisation pérenne, le dioxyde de soufre est interdit pour la destruction des nids alors que la substance permet d’enrayer les nids situés à grande hauteur, à peu de coût avec un faible impact sur l’environnement contrairement aux molécules actuellement autorisées. À défaut de coordination nationale efficace et de moyens financiers à la hauteur, la lutte est menée de manière très inégale sur le terrain, en grande partie avec l’énergie et les fonds des apiculteurs, parfois avec le soutien de collectivités locales conscientes des dangers du frelon asiatique. Dans les régions faiblement colonisées jusqu’à 2013 comme le Morbihan, les apiculteurs déplorent cette année une explosion du nombre de nids de frelon, avec une présence quasiment constante des frelons devant les ruches. À défaut de réponse administrative, les particuliers qui découvrent un nid sur leur terrain se tournent vers les seules structures préparées pour intervenir : les désinsectiseurs. Mais ces derniers pratiquent souvent des tarifs prohibitifs que les particuliers ne sont pas prêts à honorer. Dans ces conditions, comment espérer enrayer la progression du frelon, sachant qu’un nid de frelon peut abriter plusieurs centaines de fondatrices en état de nidifier l’année suivante. Il l’interroge sur ce qu’il entend mettre en œuvre pour faire évoluer la situation vers une lutte efficace contre cette espèce invasive.

Réponse du Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

> Réponse de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Pour appréhender les problématiques liées à l’apiculture de façon coordonnée, le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (MAAF) a mis en œuvre un plan de développement durable de l’apiculture (2013-2015), en miroir des actions entreprises et à entreprendre au niveau européen. Ce plan, coordonné par M. François Gerster, inspecteur général de santé publique vétérinaire, a pour objectif de relever le défi d’une filière apicole durable et compétitive. Il bénéficiera pour cela de moyens nationaux et communautaires d’environ 40 millions d’euros sur trois ans. L’ambition est de faire de la France l’un des plus grands pays apicoles de l’Union européenne alors que chaque année, la France importe 25 500 tonnes de miel pour 40 000 consommées. Articulé en 17 axes et décliné en 115 actions, ce plan prend en compte à la fois la santé des abeilles et le soutien à la recherche dans le domaine de l’apiculture, le développement du cheptel français, la formation et l’installation des jeunes apiculteurs, et l’organisation de la filière apicole et de sa production. Plus particulièrement, le 4e axe de ce plan est dédié spécifiquement à la lutte contre le frelon asiatique, à la fois sur les aspects juridiques et techniques. Sur le plan réglementaire, des textes ont été adoptés pour permettre aux acteurs d’intervenir sur le terrain. Un arrêté du MAAF en date du 26 décembre 2012 classe le frelon asiatique dans la liste des dangers sanitaires de deuxième catégorie. Ce statut confère une reconnaissance officielle à ce prédateur qui a émergé en France en 2007 et s’est largement installé sur une grande partie du territoire. Les professionnels et collectivités locales ont ainsi la possibilité de faire reconnaître des programmes de lutte contre ce nuisible. Parallèlement, l’État appuie cette lutte en encourageant et en finançant des études de suivi et d’efficacité des méthodes de lutte. Une note de service en date du 10 mai 2013 de la direction générale de l’alimentation (DGAL) définit les mesures de surveillance, de prévention et de lutte permettant de limiter l’impact du frelon asiatique sur les colonies d’abeilles domestiques. Un autre arrêté du 22 janvier 2013 du ministère de l’écologie du développement durable et de l’énergie (MEDDE) interdit l’introduction du frelon sur le territoire national. Sur les aspects techniques, la DGAL anime un groupe de travail comprenant l’ensemble des partenaires : le muséum national d’histoire naturelle, l’institut technique de l’abeille et de la pollinisation (ITSAP), les syndicats et les professionnels de la filière. Le but est de suivre l’évolution de ce prédateur et d’expertiser les voies et moyens de lutte efficace : piégeage, types d’appâts, sélectivité, périodes de capture… C’est ainsi qu’une expérimentation a été conduite en 2013 et rééditée en 2014, sur financement du MAAF, afin de tester l’efficacité des appâts et des pièges à frelon. Les résultats seront disponibles début 2015 et in fine vont permettre la mise à jour de la réglementation. Un arrêté cosigné le 21 août 2013 par le ministère chargé de l’agriculture et le ministère chargé de l’écologie, a permis une dérogation temporaire de 120 jours pour l’usage du dioxyde de souffre (SO2) utilisé pour la destruction des nids de frelon asiatique. Le renouvellement de cette dérogation ou son autorisation permanente n’a pu être prorogée faute de dossier de demande d’homologation, censé être portée par les professionnels de la filière apicole. Une éventuelle révision du statut et le passage de ce danger sanitaire en première catégorie pourrait être soumise à l’avis du conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (CNOPSAV) lorsque seront disponibles d’une part l’avis de l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail sur les dangers sanitaires menaçant l’abeille attendu pour le premier semestre 2015, et d’autre part une expertise sur les méthodes de lutte efficaces à mettre en œuvre.

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